Fret : Le bois ne prendra plus le chemin de fer
Alors que les usagers tempêtent, sans succès pour l'instant, contre la suppression d'une quinzaine d'arrêts de train en gare de Souillac, une autre forme de transport s'apprête à disparaître à Souillac. Ces jours-ci, la gare voit en effet passer ses derniers trains chargés de stères de bois. Depuis une dizaine d'années, deux trains de 18 wagons (soit un tonnage annuel de 19 000 tonnes) quittaient Souillac pour Saint-Gaudens où se trouve l'usine de pâte à papier qui constitue le principal client de Jean-Pierre Souletis.
Pour cet exploitant forestier, les quatorze salariés et la trentaine de bûcherons débardeurs qu'il emploie, c'est un coup dur. L'an dernier, l'usine de Saint-Gaudens avait accepté l'augmentation de 100 % des tarifs imposée par la SNCF. Mais cette fois-ci, elle jette l'éponge et préfère avoir désormais recours au transport par la route. « À partir du 1er janvier 2008, la SNCF augmente de nouveau ses prix. Le wagon coûtera 1 440 euros contre 820 jusqu'à présent, s'indigne Jean-Pierre Souletis. Par la route, c'est moitié prix, alors forcément, le groupe papetier a décidé d'arrêter les frais ».
Trafic accru sur les petites routes
Le bois ne sera donc plus acheminé par le fer, mais on le retrouvera sur nos routes… à Sarlat, Calviac, Souillac. Les rotations de semi-remorques vont se multiplier avec les risques que cela comporte pour les chauffeurs des camions, surtout lorsque les frimas arrivent et qu'il faut déjouer les redoutables barrières de dégel, mais aussi pour les automobilistes qui vont être tentés de dépasser les poids-lourds sur des routes qui ne le permettent pas forcément.
« Le transport routier va malheureusement aggraver l'encombrement de la route Vézac-Souillac, déjà très fréquentée et particulièrement dangereuse pour ce genre de transport », confirme Jean-Pierre Souletis, tandis qu'il expose son cas au conseiller général André Lestrade. Souillac était la dernière gare bois de Midi-Pyrénées. « Par le passé, j'ai déjà été contraint d'abandonner les expéditions depuis Vézac, Sarlat, Le Buisson et Niversac. Avec Souillac, c'est une page qui se tourne définitivement ».
« À l'heure du Grenelle de l'environnement, il est incohérent de permettre que la SNCF augmente les prix d'un tel pourcentage », s'indigne André Lestrade. « En augmentant ses tarifs, la SNCF sait qu'elle va décourager le transport par le rail. Dans quelque temps, elle arguera qu'une petite gare comme Souillac n'a plus assez d'activité pour fonctionner et expliquera qu'il faut la fermer », pronostique Jean-Pierre Souletis en levant les yeux vers les immenses bras mécaniques qui soulèvent pour la dernière fois les stères entassés devant la gare.
La Dépêche du Midi, 7 Décembre 2007